Aller au contenu

Page:Drieu la Rochelle - Le Feu Follet (1931).pdf/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



Alain ne descendit de sa chambre qu’à l’heure du déjeuner.

La salle à manger, le salon, les couloirs, les escaliers, étaient tapissés de littérature. Le docteur de la Barbinais n’avait pas craint d’aligner sous les yeux des neurasthéniques qu’il soignait les portraits de tous les écrivains qui depuis deux siècles s’étaient rendus célèbres par leurs chagrins. Avec l’innocente perversité du collectionneur, il les faisait passer peu à peu des solides visages des rêveurs de l’autre siècle, à ceux, bien élimés, de certains contemporains. Mais, pour lui comme pour ses hôtes, il ne s’agissait que de célébrité. Pour Alain, ç’‬aurait pu être d’autre chose ; mais il se voyait là dans un de ces musées où il ne mettait jamais les pieds, aussi passait-il fort vite.

Tout le monde était déjà à table autour du docteur et de Mme de la Barbinais. Ces repas en commun apparaissaient à Alain le moment le plus incroyable de son séjour dans un lieu qui