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Page:Drieu la Rochelle - Le Feu Follet (1931).pdf/45

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le clair-obscur quotidien où il contrebalance d’espoirs et d’illusions le progrès de ses actes. C’est pourquoi Alain en revenait encore pour de longs moments à l’idée qu’il avait caressée, toute sa jeunesse — cette jeunesse qui finissait, car il venait d’avoir trente ans, et trente ans c’est beaucoup pour un garçon qui n’a pour lui que sa beauté — que tout s’arrangerait par les femmes.

En ce moment, l’obscur sentiment d’échec que lui laissait le départ de Lydia le ramenait vers Dorothy.

— Vous savez ce que vous devriez faire, mon cher ami, reprit le docteur, vous devriez télégraphier à votre femme. Elle a reçu votre lettre qui a dû la toucher. Mais il faut la confirmer dans son sentiment, lui donner l’impression que vous persévérez.

— À quoi bon ?

Cependant cette idée lui souriait. Il avait toujours beaucoup aimé les télégrammes où il satisfaisait son goût pour un humour désastreux et aussi ses élans de tendresse facilement abrégés.

— Mais si, télégraphiez-lui, dites-lui de prendre le premier bateau. Restez ici jusqu’à son arrivée ; aussitôt qu’elle sera là, partez avec elle dans le Midi ou plus loin. Surtout n’allez pas à Paris, ne revoyez pas tous ces gens qui vous font du mal.

— Bah ! un télégramme de plus ou de moins.