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Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/221

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L'ORDRE D'EXÉCUTION.

tête ! » Le brigadier Adam averti par un des greffiers, dit ce mot profond : « Pourvu qu’il ne boive pas trop ! »

Les greffiers et les surveillants ne doutaient pas de la résolution sincère de Caullet, mais ils connaissaient sa faiblesse ; ils convinrent entre eux de le garder pour ainsi dire à vue et de ne jamais le laisser seul avec les messagers de la Préfecture de police ou du ixe secteur. Il n’y avait pas une heure que l’ordre de Ferré avait été reçu, lorsque le commandant Cayol arriva de la part de Sérizier. Brusquement il dit à Caullet, que l’on avait retenu à causer dans le greffe : « Peut-on compter sur ton personnel ? — Oui, il est dévoué. — As-tu reçu l’ordre de fusiller tous les mouchards que tu as en otage ? — Oui. — Quand leur feras-tu casser la tête ? » Un greffier intervint et répondit : « L’ordre est éventuel, nous ferons le nécessaire. » Cayol se contenta de cette assurance et s’éloigna ; avant de partir, il dit à Caullet : « Veux-tu que je t’envoie des hommes ? » Caullet riposta : « C’est inutile ; la compagnie qui est de service à la porte d’entrée suffira… » Lorsque Cayol fut parti, Caullet, répondant à sa pensée intime, dit à haute voix : « Non ! on ne les fusillera pas ici ; si on veut les fusiller, on les emmènera ailleurs. J’ai été soldat, je ne suis pas un coquin ; non, je ne les laisserai pas fusiller. » Il était fort animé ; sa résolution de sauver les otages était prise et ne vacilla plus.

Sans savoir ce qui se passait, les otages étaient inquiets ; ils comprenaient que le dénouement était proche ; quel serait-il ? Si souvent on les avait menacés de les mettre à mort, qu’ils s’y attendaient et se préparaient à avoir bonne contenance devant les assassins. La journée cependant ne fut plus troublée ; nul ordre nouveau, nulle visite nouvelle ne vint activer les angoisses du personnel, décidé à sauver les détenus et ne sachant pas encore s’il y parviendrait. Les évènements