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Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/227

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L'ORDRE D'EXÉCUTION.

moins exposées, et l’on se demandait si, après avoir échappé à une exécution militaire, on n’allait pas périr sous les projectiles de l’insurrection.

Le déchirement des toitures par les obus, le bruit continu de la fusillade, avaient exaspéré les nerfs de Caullet ; il parut tout à coup armé d’un revolver qu’il brandissait au-dessus de sa tête, en criant : « À moi, tout le personnel ! on massacre nos frères ! En avant ! en avant ! » On le regarda avec surprise, et personne ne bougea. « Vous êtes des lâches si vous ne me suivez pas ! » Son allocution ne produisit pas grand effet ; les surveillants haussèrent les épaules et continuèrent leur service. Caullet s’élança hors de la prison et y rentra cinq minutes après tout à fait calmé. La nuit fut dure : la Butte-aux-Cailles n’avait point suspendu son feu, et les obus n’épargnaient point la prison ; on se coucha vêtu pour être prêt à tout évènement.

Le 24, il y eut des interruptions et des reprises de fusillade qui ravivaient et affaiblissaient l’espoir des otages ; les vivres commençaient à manquer. Entre onze heures et midi, le vitrage de la maison s’abattit dans les couloirs comme un ouragan de verres cassés. C’était la poudrière du Luxembourg qui venait de sauter. Vers trois heures de l’après-midi, un surveillant qui avait été jeter un coup d’œil dehors vint annoncer que les barricades étaient abandonnées et que la rue de la Santé restait déserte. Les greffiers tinrent rapidement conseil entre eux ; puis on enferma Caullet dans son propre cabinet, en lui déclarant qu’on le regardait comme démissionnaire et détenu ; il ne fit aucune résistance et dit seulement : « Je me recommande à M. Claude. » M. Laloë prit la direction de la maison. Un gardien fut placé près de la porte d’entrée, avec ordre de surveiller la rue ; il ne tarda pas à aper-