Aller au contenu

Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/345

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
323
LA RÉVOLTE DES OTAGES.

vingt et un de leurs compagnons, étaient silencieux et troublés. Un instant, ils avaient eu quelque espoir. Dans la matinée, la fusillade avait semblé se rapprocher de la Grande-Roquette, comme si l’armée en eût attaqué les rues voisines ; mais le bruit s’était éloigné et ne leur parvenait plus que sous forme de rumeur confuse ; les prêtres priaient, les laïques pensaient aux êtres chers qui les attendaient au logis. Le brigadier Ramain, le sous-brigadier Picon, s’agitaient et tâchaient de remonter le moral des surveillants, qui paraissait singulièrement affaissé. Quelques-uns disaient : « Sauvons-nous de cet enfer ; » les autres répondaient : « Non, restons pour protéger les otages. » François, dans son costume des grands jours, l’écharpe rouge en sautoir, le revolver à la ceinture, le sabre traînant, le képi galonné sur l’oreille, promenait partout son importance et semblait attendre quelque grand évènement. Souvent il sortait, regardait vers le haut de la rue de la Roquette ; plusieurs fois, Clovis Briant, le directeur de la maison d’éducation correctionnelle, était venu causer confidentiellement avec lui.

Il était une heure environ lorsque Ferré, à cheval, arriva à la Grande-Roquette ; deux cavaliers l’escortaient ; l’un d’eux, dit-on, était Gabriel Ranvier ; nous ne rapportons ce bruit qu’avec réserve, car nous n’avons pu en contrôler l’exactitude. Un bataillon de fédérés les suivait ; un peloton pénétra dans la première cour, le reste des hommes fut rangé sur la place. Ferré se rendit au greffe, où il fut reçu par François : « Nous venons chercher les curés et les sergents de ville. » À ce moment, le surveillant Bourguignon se trouvait au grand guichet. Il reconnut Ferré, il entendit les paroles adressées à François. Ferré lui prescrivit de prendre tout de suite une voiture et d’aller chercher des vivres pour les soldats du poste, qui s'étaient plaints de n’a-