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Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/351

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LA RÉVOLTE DES OTAGES.

ne le cacha point et l’atticisme de ses expressions parut s’en ressentir. Il fit appeler Clovis Briant, le directeur de la Petite-Roquette, et lui dit : « Avez-vous préparé l’évacuation ? Vous savez qu’elle doit s’opérer en trois détachements ; faites sortir vos hommes. » Clovis Briant retourna promptement à la prison et Ferré dit à François : « Envoie-moi tous les soldats ; à défaut des curés, je les emmène. » Quatre-vingt-quinze soldats, extraits des chambrées du bâtiment de l’ouest, arrivèrent bientôt ; ils se massèrent dans la cour d’entrée. Lorsqu’ils sortirent, ils aperçurent un bataillon de fédérés · rangé sur la place, ouvert en deux détachements prêts à se replier sur eux. Au moment où ils franchissaient le seuil de la prison, trois cents militaires, le sac au dos, sortaient de la Petite-Roquette. On mettait à exécution le projet de Delescluze ; on allait réunir à Belleville tous les soldats internés depuis le 18 mars, incarcérés depuis le 22 mai, et essayer de traiter en les offrant en échange de quelques conditions acceptables. Avant de quitter le greffe de la Grande-Roquette, Ferré dit : « Je vais escorter ces prisonniers, j’aurai encore deux détachements à conduire ; arrangez-vous de façon à m’avoir les sergents de ville et les curés, car je reviendrai les chercher moi-même, et malheur à vous si je ne les ai pas ! » Ceci dit, il remonta à cheval et s’élança sur la place, où il arriva juste à temps pour entendre un cri formidable de « Vive la ligne ! »

Ceci est un fait fort remarquable, encore mal expliqué, et qui fera comprendre comment aucun des mille quatre cent vingt-huit soldats extraits des deux Roquettes et dirigés sur Belleville ne fut même insulté. Tous les gens du quartier, voyant une troupe armée réunie sur l’emplacement qui s’étend entre les deux prisons, s’étaient groupés par curiosité. Ces petits marchands d’objets funèbres, dont le commerce, alimenté par le