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Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/89

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LE PRÉSIDENT BONJEAN.

mune. Cette question, d’où leur avenir pouvait dépendre, les troublait beaucoup ; ce fut M. Bonjean qui dénoua la difficulté.

Le 29 mars, il avait reçu, pendant une absence de Garreau, la visite de M. Durlin, second greffier à la maison de justice ; il l’avait adjuré de ne point quitter la Conciergerie et de veiller sur les gendarmes qui y étaient enfermés. Cette recommandation ne fut point oubliée, nous le verrons plus tard. Il connaissait trop bien l’administration pour ne pas savoir qu’elle obéit à une hiérarchie indispensable et que les surveillants resteraient indécis tant qu’ils pourraient ne pas se croire approuvés par leur chef direct ; or ce chef direct était à Versailles, et les routes,— on l’a vu par l’arrêté de Lucien Henry,— n’étaient point positivement libres. M. Bonjean, se fiant sans réserve au dévouement que les employés de la prison lui témoignaient, écrivit à M. Paul Fabre, procureur général à la Cour de cassation, une lettre datée du 30 mars 1871, sept heures du matin, dont le texte même est sous nos yeux et qui eut d’inappréciables résultats :

« Mon cher procureur général, des notes insérées dans plusieurs journaux invitent les employés des diverses administrations de Paris à cesser tout service dans cette ville, pour se rendre à Versailles. Je ne sais si ces notes ont un caractère officiel ; mais ce qui est évident pour moi, c’est que la mesure dont elles parlent, étendue aux employés des prisons, pourrait devenir fatale à une foule d’honnêtes gens actuellement détenus à Paris sous divers prétextes. Cependant, à la lecture de ces notes, beaucoup d’employés hésitent ; quelques-uns même, craignant d’encourir la disgrâce du gouvernement, ont déjà abandonné leur service, au grand chagrin des pauvres prisonniers. Autant que j’ai pu, du fond de ma cellule, j’ai combattu une tendance si fu-