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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/232

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De la manière de se conduire dans l’usage du monde.


S’il arrive un revers de fortune, il faut tenir son âme dans une assiette aussi calme et aussi tranquille qu’elle était auparavant : un philosophe, qui n’a pas acquis cet art de se posséder, quel avantage a-t-il sur ceux qui n’ont pas étudié ?

Un vieillard sans vertu, un pauvre sans ressource, ce sont là deux sortes d’hommes, avec qui il ne faut être ni en commerce, ni en différend.

Celui qui se mêle peu des affaires qui ne le regardent pas, s’épargnera bien des inquiétudes : celui qui tient rarement de vains discours, évitera beaucoup de fautes.

Je vois un homme, qui est prêt de faire une mauvaise action ; je dois faire mes efforts pour l’en détourner : si j’y manque, ou si je n’agis que faiblement, et qu’il suive son mauvais dessein, je participe au mal qu’il fait.

L’eau trop claire est sans poisson ; l’homme trop clairvoyant vit sans société.

Il n’appartient qu’à un génie élevé de savoir tirer du service des âmes basses. De même il faut avoir beaucoup de vertu pour vivre avec des gens qui en ont peu.

Quand il s’agit de vertu, je dois jeter les yeux sur ceux qui en ont plus que moi : la confusion que j’en recevrai, m’excitera à les imiter. Quand il s’agit de fortune, je dois considérer ceux qui l’ont moins avantageuse que moi : par là je serai moins porté à murmurer et à me plaindre de mon sort.

Il ne faut pas se roidir contre ces personnes, qui abusant de leur autorité et de la dépendance où l’on est à leur égard, prennent avec vous des airs fiers et impérieux ; ce qu’il y a à faire, c’est d’éviter tout rapport avec eux, et de s’en tenir le plus éloigné qu’il est possible.

Dans la vie, quand il n’arrive aucun contre-temps, il faut se dire deux fois : combien de temps ce calme durera-t-il ?

Lorsque je rencontre un homme qui vient d’avoir quelque succès, je dois faire paraître de la joie. Si j’en trouve un autre qui n’a pas réussi dans une entreprise, je dois marquer de la tristesse et de la compassion.

N’exigez pas des personnes avancées en âge des honnêtetés qui puissent les fatiguer ; ni des gens peu à leur aise, des services où il faille faire de la dépense. Que les défauts d’autrui demeurent dans votre cœur, sans sortir de votre bouche.

Dans toutes les affaires grandes ou petites, la raison doit présider. Cependant lorsque j’ai la raison de mon côté, si j’ai à traiter ou avec des