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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/373

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Au moment qu’ils s’aperçoivent que le soleil ou la lune commence à s’obscurcir, ils se jettent tous à genoux, et frappent la terre du front. En même temps on entend un bruit épouvantable de tambours et de timbales par toute la ville, suivant la ridicule persuasion où étaient autrefois les Chinois, que par ce bruit ils secouraient le soleil ou la lune, et empêchaient que le dragon céleste ne dévorât des astres si nécessaires.

Quoique les savants et les gens de qualité soient parfaitement détrompés de cette ancienne erreur, et qu’ils soient bien persuadés que ces éclipses sont des effets purement naturels, ils ne laissent pas de continuer leur ancienne cérémonie, tant ils sont attachés à leurs usages. Ces cérémonies se pratiquent de la même manière dans tous les lieux de l’empire.

Tandis que les mandarins sont ainsi prosternés, il y en a d’autres à l’observatoire, qui examinent attentivement le commencement, le milieu, et la fin de l’éclipse, et qui comparent leurs observations avec les figures qu’on leur a données. Ils portent ensuite ces observations signées et scellées de leur sceau, pour être présentées à l’empereur, lequel de son côté observe l’éclipse dans son palais avec la même attention. Les mêmes cérémonies se pratiquent dans tout l’empire.

Le principal ouvrage de ce tribunal est le calendrier qui se distribue chaque année dans tout l’empire. Il n’y a point de livre dans le monde dont il se fasse tant de copies, ni que l’on publie avec tant de solennité. Il y a toujours à la tête un édit de l’empereur, par lequel il est défendu sous peine de la vie de se servir d’un calendrier différent, ou d’entreprendre d’en publier quelque autre, ou d’y rien altérer sous quelque prétexte que ce soit. Il faut nécessairement en tirer plusieurs millions d’exemplaires, parce qu’il n’y a personne à la Chine, qui ne veuille avoir ce livre, pour se régler pendant le cours de l’année.

Trois tribunaux sont établis à Peking, pour dresser autant de calendriers qui doivent être présentés à l’empereur. L’un de ces tribunaux est auprès de l’observatoire. Le second, où l’on explique la théorie des astres, et les moyens de calculer, est une espèce d’école publique pour les mathématiques. Enfin le troisième, qui est assez près du palais de l’empereur, est celui où se traitent toutes les affaires qui regardent l’astronomie, et où s’expédient tous les actes qui concernent cette science.

Comme il y a trois tribunaux pour les mathématiques, il y a aussi trois classes de mathématiciens ; et même autrefois des astrologues mahométans en composaient une quatrième, qui ne subsiste plus.

C’est la première de ces classes qui est chargée de dresser le calendrier, de calculer les éclipses du soleil et de la lune, et de faire toutes les autres supputations astronomiques.

On met au jour tous les ans trois sortes de calendriers en langue tartare et en langue chinoise. Le plus petit des trois, qui est le calendrier commun, distingue l’année par des mois lunaires, avec l’ordre des jours de chaque mois, l’heure et les minutes du lever et du coucher du soleil pour chaque jour, la durée des jours et des nuits, selon les diverses