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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/389

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DU GOÛT
DES CHINOIS
POUR LA POÉSIE,
POUR L’HISTOIRE,
ET
POUR LES PIÈCES DE THÉÂTRE.


Pour bien connaître en quoi consiste la beauté de la poésie chinoise, il faudrait posséder leur langue ; et comme la chose n’est pas aisée, aussi ne peut-on guère en donner qu’une idée fort superficielle.

Les pièces de vers que les Chinois composent, sont à peu près semblables aux sonnets, aux rondeaux, aux madrigaux, et aux chansons qui sont en usage parmi les poètes d’Europe. Leurs vers se mesurent par le nombre des caractères, qui sont autant de mots monosyllabes : ils font des vers les uns plus grands, et les autres plus petits ; c’est-à-dire, de plus ou de moins de mots qu’ils entrelacent, et qui plaisent par la variété de la cadence et de l’harmonie.

Le rapport que les vers doivent avoir les uns aux autres, consiste, et dans la rime, et dans la signification des mots, qui ont entr’eux une variété de tons agréable à l’oreille. Ils ont une autre espèce de poésie, qui ne consiste point dans la rime, mais dans une espèce d’antithèse pour les pensées ; en sorte que si la première pensée est sur le printemps, la seconde sera sur l’automne ; ou si celle-là est sur le feu, celle-ci sera sur l’eau. Cette manière de composer a son art et ses difficultés.

Leurs poètes ont de l’enthousiasme : leurs expressions sont souvent allégoriques, et ils savent employer à propos les figures qui rendent le style plus animé et plus pathétique.

Pour ce qui est de l’histoire, il n’y a guère de peuples qui aient été aussi soigneux que les Chinois d’écrire et de conserver les annales de leur