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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/604

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ne retenait plus son urine : il avait le pouls élevé, et tout à fait déréglé. Tous ces symptômes marquaient évidemment un épuisement presque entier de l’humide radical. Je fis préparer promptement de cet électuaire de gin seng ; je lui appliquai dix-huit boutons de feu d’une espèce d’armoise, sur le réservoir qui est dans l’abdomen directement au-dessous du nombril, et que l’on nomme la mer des esprits. La main gauche recouvra aussitôt le mouvement. Après avoir appliqué deux autres boutons, les lèvres et la bouche commencèrent à se remuer un peu. Je lui fis prendre aussitôt une porcelaine médiocre d’électuaire de gin seng. Vers minuit je lui en fis prendre trois autres, après quoi les yeux commencèrent à se mouvoir. Il n’en eut pas pris trois livres que la parole lui revint, et il demanda un bouillon de riz cuit dans l’eau en forme de bouillie. Après en avoir pris cinq livres, le ténesme s’arrêta ; et après en avoir pris dix livres, il se trouva parfaitement guéri. Si on l’eut traité comme on traite ceux qui sont tombés en apoplexie, c’était un homme mort.

Une personne avait un abcès derrière le dos ; après avoir pris le remède appelle neui to ché suen, l’abcès creva, et jeta quantité de pus ; ce qui fut suivi de grands vomissements, et de la fièvre. Les six pouls[1] des deux mains étaient profonds, roides et forts. Ces symptômes sont mauvais dans ces sortes de conjonctures. Je lui fis prendre aussitôt de l’électuaire de gin seng, délayé dans l’eau qui distille du bambou, quand il est fraîchement coupé. On dépensa jusqu’à seize livres de gin seng, et on coupa plus de cent pieds de bambou. Après cela il se trouva bien.

Dix jours après, un vent furieux s’étant élevé, l’abcès se forma une seconde fois, et se remplit de matière. Il paraissait au milieu une ligne rouge, qui passant par-dessous les omoplates, allait aboutir aux côtes droites. J’ordonnai sur-le-champ qu’on fit de l’électuaire de gin seng, et qu’on lui en fît prendre dans des bouillons de cong couei, et de peau d’écorce d’orange, et qu’on mît dans ces bouillons de l’eau de bambou, et du jus de gingembre. Après avoir bu trois livres pesant de cette drogue, l’abcès s’ouvrit, et le malade ayant ensuite été bien traité, il guérit.

Que si après que les abcès se sont ouverts, le malade se sent épuisé de sang et d’esprits ; s’il vomit, et ne peut rien prendre ; si enfin il a divers autres symptômes peu favorables, il faut prendre du gin seng, du hoang ki, du tan couei et du pé tchu en égale quantité ; et ayant fait cuire le tout jusqu’à la consistance d’électuaire, en faire prendre au malade. Ce remède est excellent.

  1. Quand les Chinois tâtent le pouls, ils le font aux deux mains, l’une après l’autre. Ils appliquent trois doigts sur la veine. L’index à la racine du poignet, celui du milieu, et l’annulaire ; et ces trois doigts se touchent. Le pouls qui répond à chaque doigt a un nom particulier, ce qui fait trois pouls à chaque main, et six en tout. Ils prétendent que chacun de ces pouls marque la disposition de celles des parties vitales qui lui répondent.