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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/659

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Il serait inutile de rapporter un plus grand nombre de ces sortes de recettes : l’Herbier chinois, dont j’ai donné un petit extrait, fournirait lui seul de quoi en remplir plusieurs volumes ; mais de quel usage pourraient-elles être en Europe, où les noms des racines et des simples, dont les médecins chinois composent leurs remèdes, sont tout à fait inconnus ?

Mon dessein n’étant d’ailleurs, que de faire connaître, de quelle manière les Chinois traitent la médecine, à laquelle il paraît qu’ils se sont appliqués dès la naissance de leur empire, j’ai cru devoir me borner à un certain nombre de remèdes, dans la composition desquels ils font entrer leurs racines, leurs plantes, leurs simples, leurs arbres, leurs animaux, et même leurs insectes, et d’en rapporter quelques-uns de chaque sorte. Comme ce sont les Chinois eux-mêmes qui nous en instruisent, on sera plus en état de juger de la capacité de leurs médecins.

Ce qu’il y a de vrai, c’est qu’avec leurs remèdes, ils ne sont pas moins habiles à guérir leurs malades, que les médecins d’Europe : mais ce qu’ils ont certainement de singulier, c’est l’art de connaître les diverses maladies par le simple tact du pouls : ils ne peuvent sans doute avoir acquis cette connaissance, qui est très importante pour une application sûre des remèdes, que par une longue expérience, et par un exercice encore plus long de patience, auquel le phlegme chinois a moins de peine à s’assujettir que la vivacité européenne.

Je finis cet article de la médecine chinoise, par l’extrait d’un ouvrage qu’a traduit le P. Dentrecolles, dont l’auteur ne paraît pas trop favorable aux médecins de sa nation. Après avoir longtemps étudié les meilleurs livres de médecine, pour se procurer le soulagement qu’il cherchait, il prétend avoir trouvé le secret de se passer du secours des médecins et de leurs remèdes. Ce secret consiste dans un régime qu’il s’est fait à lui-même, par le moyen duquel il assure qu’il s’est guéri de deux ou trois maladies mortelles, et qu’il est parvenu à une longue vieillesse exempte de toute infirmité. Il propose à ses concitoyens un régime qui lui a été si salutaire, en les exhortant de le pratiquer, et d’apprendre par là à être à eux-mêmes leur propre médecin.

Par l’extrait que je donne de cet ouvrage, on connaîtra de plus en plus le goût des Chinois, et leur manière de penser dans les matières qu’ils traitent. Il parut la trente-sixième année du règne du feu empereur Cang hi. L’auteur l’intitula, Tchang seng. C’est sous ce nom que les docteurs d’une fausse secte de la Chine, se vantent d’enseigner le secret de se rendre immortel. On a vu plusieurs empereurs, qui ont été assez dupes pour se laisser infatuer d’une idée si chimérique.

Ce même titre pourrait donner d’abord une mauvaise opinion du dessein de notre auteur : mais dès le commencement de son ouvrage, il a soin d’écarter un soupçon si injurieux à un Lettré chinois.