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ASCANIO.

disons-nous, s’était couvert de fer des pieds à la tête, et semblait une de ces gigantesques statues comme les statuaires de cette belle époque d’art en couchaient sur les tombeaux. Aussi Benvenuto, malgré la force devenue proverbiale dans l’atelier de ce brave compagnon d’outre-Rhin, lui fît observer que peut-être éprouverait-il, enfermé comme il l’était dans une pareille carapace, quelque difficulté à se mouvoir, et que sa force, au lieu d’y gagner, y perdrait certainement. Mais, pour toute réponse, Hermann sauta sur un établi aussi légèrement que s’il eût été habillé de velours, et décrochant un énorme marteau, il le fit tournoyer au-dessus de sa tête, et frappa sur l’enclume trois si terribles coups, qu’à chacun de ces coups l’enclume s’enfonça d’un pouce dans la terre. Il n’y avait rien à répondre à une pareille réponse : aussi Benvenuto fit-il de la tête et de la main un salut respectueux en signe qu’il était satisfait.

Seul Ascanio avait fait sa toilette de guerre en silence et à l’écart ; il ne laissait pas d’avoir quelque inquiétude sur les suites de l’équipée qu’il entreprenait ; car enfin Colombe pourrait bien ne pas lui pardonner d’avoir attaqué son père, surtout si la lutte amenait quelque grave catastrophe, et, plus près de ses yeux, peut-être allait-il se trouver plus loin de son cœur.

Quant à Scozzone, moitié joyeuse, moitié inquiète, elle pleurait d’un côté et riait de l’autre ; le changement et la bataille, cela lui allait, mais les coups et les blessures ne lui allaient pas ; les apprêts du combat faisaient sauter de joie le lutin, les suites du combat faisaient trembler la femme.