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ASCANIO.

— Oui, mais, madame, Cellini, qui n’est pas tres pénétrant sans doute, et qu’on a d’ailleurs abusé, vous croit, je puis bien vous le dire à vous si gracieuse et si bonne, vous croit bien méchante et bien terrible, et dans un enfantillage il a cru voir une offense.

— Croyez-vous cela ? reprit la duchesse sans pouvoir cacher tout à fait son sourire railleur.

— Oh ! pardonnez-lui, madame ! s’il vous connaissait, croyez-moi, il est noble et généreux, il vous demanderait pardon à genoux de son erreur.

— Mais taisez-vous donc ! Prétendez-vous faire que je l’aime maintenant ? Je veux lui en vouloir, vous dis-je, et pour commencer, je vais lui susciter un rival.

— Ce sera difficile, madame.

— Non, Ascanio, car ce rival c’est vous, c’est son élève. Laissez-moi au moins ne lui rendre qu’un hommage indirect, à ce grand génie qui m’abhorre. Voyons, vous, dont Cellini lui-même vante la grâce d’invention, est-ce que vous refuserez de mettre cette poésie à mon service ? et puisque vous ne partagez pas les préventions de votre maître contre ma personne, ne me le prouverez-vous pas, dites, en consentant à l’embellir ?

— Madame, tout ce que je puis et tout ce que je suis est à vos ordres. Vous êtes si bienveillante pour moi, vous vous informiez tout à l’heure avec tant d’intérêt de mon passé, de mes espérances, que je vous suis dévoué maintenant de cœur et d’âme.

— Enfant ! je n’ai rien fait encore et je ne vous demande à l’heure qu’il est qu’un peu de votre talent. Voyons, avez-vous vu en rêve quelque prodigieux bijou ? J’ai là des perles magnifiques ; en quelle pluie merveilleuse souhaitez-vous