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ASCANIO.

— Et avez-vous actuellement en tête quelque belle composition, Cellini ?

— Oh ! oui, sire, un Christ. Non pas un Christ sur la croix, mais un Christ dans sa gloire et dans sa lumière, et j’imiterai autant que possible cette beauté infinie sous laquelle il s’est fait voir à moi.

— Quoi ! dit Marguerite la sceptique en riant, outre tous les rois de la terre, avez-vous vu aussi le roi des cieux ?

— Oui, madame, répondit Benvenuto avec une simplicité d’enfant.

— Oh ! racontez-nous donc encore cela, dit la reine de Navarre.

— Volontiers, madame, répondit Benvenuto Cellini avec une confiance qui indiquait qu’il ne pensait même pas que l’on pût mettre en doute aucune partie de son récit. J’avais vu quelque temps auparavant, continua Benvenuto, j’avais vu Satan et toutes les légions du Diable, qu’un prêtre nécromant de mes amis avait évoqués devant moi au Colysée, et dont nous eûmes vraiment beaucoup de peine à nous défaire ; mais le terrible souvenir de ces infernales visions fut bien à tout jamais effacé de mon esprit quand à mon ardente prière m’apparut, pour me réconforter dans les misères de ma prison, le divin Sauveur des hommes, au milieu du soleil, et tout couronné de ses rayons.

— Et vous êtes véritablement sûr, demanda la reine de Navarre, sûr sans aucun mélange de doute, que le Christ vous soit apparu ?

— Je n’en doute pas, madame.

— Allons, Benvenuto, faites-nous donc un Christ pour