Page:Dumas - Œuvres - 1838, vol.2.djvu/316

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tiques, dans leurs réponses, m’ont fait voir que tu cachais ici ton mariage ; et pour t’épargner le blâme de tes valets, il m’a fallu, par de honteux détours, expliquer mes premières paroles, et m’associer à ton mensonge.

RICHARD, à Tompson.

Ne m’avez-vous pas dit que l’on m’attendait ?

TOMPSON.

Depuis longtemps.

MAWBRAY.

Je vous gêne, Richard.

RICHARD.

Je suis obligé d’entrer là ; des affaires importantes.

TOMPSON, va parler à l’huissier.

Prévenez le marquis.

MAWBRAY.

N’oubliez pas que Jenny attend dans la plus vive inquiétude la décision de son mari. Quand pourrons-nous reprendre cet entretien ?

RICHARD.

Mais tantôt.

(Il entre dans le cabinet.)
MAWBRAY.

Quelle froideur !


Scène VI.

MAWBRAY, TOMPSON, DA SYLVA.
DA SYLVA.

Eh bien ! monsieur Tompson !…

(Il s’arrête en voyant Mawbray dont les regards sont attachés sur lui. Moment de silence. Tompson les regarde tous deux avec étonnement et curiosité.)
MAWBRAY, attirant Tompson à lui.

Quelle est cette personne ?

TOMPSON.

Le marquis Da Sylva.

MAWBRAY.

Da Sylva !

(Tompson examine les traits de Mawbray, qui peignent la terreur. Da Sylva l’appelle à lui d’un signe.)
DA SYLVA.

Quel est cet homme ?

TOMPSON.

Mawbray.

MAWBRAY, revenant à lui.

Il y a ici un malheur sur moi. Fuyons.

(Il sort précipitamment.)


Scène VII.

TOMPSON, DA SYLVA.
DA SYLVA, qui a réfléchi.

Mawbray ? je ne le connais pas.

TOMPSON.

Enfin, il est parti.

DA SYLVA, bas.

Sir Richard ?

TOMPSON, bas.

Il est là.

DA SYLVA.

Si vous pouvez m’accorder quelques instants, monsieur Tompson, nous continuerons la conversation que nous avons été forcés d’interrompre.

TOMPSON.

Je vous écoute.

DA SYLVA.

Je voulais vous dire…

TOMPSON, tirant des sièges du côté du cabinet de Richard.

Asseyez-vous d’abord.

DA SYLVA.

Merci ; je voulais vous dire qu’au dernier conseil des ministres, Leurs Excellences s’étonnaient de l’acharnement avec lequel sir Richard poursuit leurs actes. Elles regrettaient que votre maître usât les belles années de sa vie, les ardeurs de son éloquence, pour des commettants qui ne peuvent ni comprendre les sacrifices qu’il leur fait, ni apprécier le talent qu’il dépense.

TOMPSON.

Vous conviendrez du moins qu’ils en profitent, et c’est le principal but de sir Richard.

DA SYLVA.

Mais quelles sont les récompenses dont dispose le peuple, monsieur Tompson ? des couronnes de chêne, dont huit jours suffisent pour faner les feuilles.

TOMPSON.

Et croyez-vous que le peuple aux mille voix n’a pas sa publicité aussi ? S’il ne peut récompenser, il peut du moins flétrir, et ce que vous proposez, car ce sont des propositions, monsieur le marquis, serait le déshonneur éternel de sir Richard. Se vendre !…

DA SYLVA.

Oui, si c’était une vente.

TOMPSON.

Qu’est-ce donc ?

DA SYLVA.

Une alliance.