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DOVAL}}.

Remerciez le seigneur Don Juan, messieurs, et non pas moi.

DON FABRIQUE.

Mais votre château ?

SANDOVAL.

Je m’y réserve six pieds de terre dans le caveau de mes ancêtres ; le reste est à vous.

DON JUAN.

Don Luis !…

SANDOVAL.

Don Juan, je commence à croire que vous serez aussi heureux à l’épée que vous l’avez été aux cartes et aux dés.

DON JUAN.

C’est vrai, j’avais oublié qu’il nous restait une dernière partie à faire.

SANDOVAL.

Je m’en souviens, moi : Don Juan, vous me trouverez toute la nuit au Prado ; ce n’est qu’à deux pas d’ici, comme vous savez. Allons, messieurs, suivez-moi.


Scène V

.

DON JUAN, seul.

Ah ! c’est une véritable Espagnole, jalouse et hautaine, portant poignard à la jarretière et poison à la ceinture. Merci, Don Luis ! vous êtes vraiment un noble cavalier, et nous surveillerons Doña-Inès.


Scène V

I. Don Juan, Inès, introduite par Gomez.

GOMEZ.

C’est ici, señora.

INÈS.

Merci.

Que vous est-il arrivé ? Qu’avez-vous, Don Luis ? Seriez-vous blessé ?

Un étranger ! un inconnu ! Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ?

DON JUAN.

Je suis un gentilhomme de Castille, fort jaloux de connaître votre beauté avant de l’avoir vue, et fort amoureux d’elle depuis que je la vois…

INÈS.

Laissons cela, señor. Où est Don Luis-de-Sandoval ? Que fait-il ?

DON JUAN.

Mais, s’il ne m’a point menti, il est à cette heure au Prado, avec ses amis, Don Fabrique et Don Henriquez…Ne fait-il pas, dites-moi, un magnifique temps de promenade ?

INÈS.

Mais pourquoi lui au Prado, et vous ici ?

DON JUAN, lui présentant le billet de Sandoval.

Tout vous sera expliqué par cette lettre, Madame.

INÈS.

Mais donnez donc ! Ne voyez-vous pas que je meurs d’impatience ?

Cette lettre n’est pas de Sandoval.

DON JUAN.

Ne reconnaissez-vous point son écriture ?

INÈS.

Si fait, par Notre-Dame, c’est bien la sienne ! Mais, écoutez, je ne comprends pas bien encore ; expliquez-moi tout cela.

DON JUAN.

Sandoval possédait un trésor dont il ne connaissait pas tout le prix ; il l’a joué, il l’a perdu, voilà tout !

INÈS.

Mais je ne vous aime pas, moi.

DON JUAN.

Si vous haïssez Sandoval, cela revient au même.

INÈS.

Oh ! Si j’étais sûre qu’il eût commis cette infamie…

DON JUAN.

Vous avez d’autres lettres de lui, comparez.

INÈS.

Oui, oui.

Voilà bien sa signature, la même qu’il ose mettre au bas de la première lettre où il me dit : « Doña Inès, vous êtes belle ; Doña-Inès, je vous aime. DON LUIS DE SANDOVAL D’OJEDO. » Un nom de noble que je croyais un noble nom ; Sandoval, c’est-à-dire l’homme que je préférais à tout dans ce monde, à ma sœur, à ma mère, à Dieu ! Et c’est celui-là, le même, le seul pour qui j’eusse dû demeurer sacrée, qui me joue, qui me perd, qui me livre, et c’est bien vrai tout cela, vrai sur l’honneur d’un Espagnol, vrai sur la foi d’un gentilhomme ?

DON JUAN.

Sur la foi d’un gentilhomme et sur l’honneur d’un Espagnol, c’est vrai.

INÈS.

Oh ! Mon Dieu ! Mon Dieu !

DON JUAN.

Maintenant, le haïssez-vous, madame ?

INÈS.

Maintenant, je le méprise.

{{Personnage|DON