Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/110

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de s’avancer vers la porte avec une démarche contrainte et pénible.

Gilbert, la sentant s’éloigner, se souleva sur une main, se retourna lentement et la suivit d’un regard étonné.

Andrée continua son chemin vers la porte, l’ouvrit, franchit l’antichambre et arriva au pied de l’escalier.

Gilbert, pâle et tremblant, la suivait en se traînant sur ses genoux.

— Oh ! pensa-t-il, elle est si indignée qu’elle n’a pas daigné s’en prendre à moi ; elle va trouver le baron, elle va lui raconter ma honteuse folie, et l’on va me chasser comme un laquais !

ta tête du jeune homme s’égara à cette pensée qu’il quitterait Taverney, qu’il cesserait de voir celle qui était sa lumière, sa vie, son âme ; le désespoir lui donna du courage ; il se redressa sur ses pieds et s’élança vers Andrée.

— Oh ! pardon, mademoiselle, au nom du ciel ! pardon, murmura-t-il.

Andrée parut n’avoir point entendu ; mais elle passa outre et n’entra point chez son père.

Gilbert respira.

Andrée posa le pied sur la première marche de l’escalier, puis sur la seconde.

— Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! murmura Gilbert ; où peut-elle donc aller ainsi ? Cet escalier ne conduit qu’à la chambre rouge, qu’habite cet étranger, et à la mansarde de La Brie. Si c’était pour La Brie, elle appellerait, elle sonnerait… Elle irait donc… Oh ! c’est impossible ! impossible !

Et Gilbert crispait ses poings de rage à la seule idée qu’Andrée pouvait aller chez Balsamo.

Devant la porte de l’étranger elle s’arrêta.

Une sueur froide coulait au front de Gilbert ; il se cramponna aux barreaux de l’escalier pour ne pas tomber lui-même ; car il avait continué de suivre Andrée. Tout ce qu’il voyait, tout ce qu’il croyait deviner lui semblait monstrueux.

La porte de Balsamo était entrebâillée ; Andrée la poussa sans y frapper. La lumière qui s’en échappa éclaira ses traits