Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/258

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fait la galanterie de m’envoyer tous les jours ce qui paraît de mieux dans ce genre. Je vous faisais même les honneurs de ces envois quotidiens.

— Oh ! madame.

— Aussi, par réciprocité, demain, vous recevrez l’épigramme, la chanson et le vaudeville en question.

— Pourquoi pas tout de suite ?

— Parce qu’il me faut le temps de les distribuer. N’est-ce pas l’habitude, d’ailleurs, que la police soit prévenue la dernière de ce qui se fait ! Oh ! ils vous amuseront fort, en vérité. Moi, j’en ai ri ce matin pendant trois quarts d’heure. Quant au roi, il en est malade d’une désopilation de la rate. C’est pour cela qu’il est en retard.

— Je suis perdu ! s’écria M. de Sartines en frappant de ses deux mains sur sa perruque.

— Non, vous n’êtes pas perdu, vous êtes chansonné, voilà tout. Suis-je perdue pour la belle Bourbonnaise, moi ? Non. J’enrage, voilà tout ; ce qui fait qu’à mon tour je veux faire enrager les autres. Ah ! les charmants vers ! J’en ai été si contente que j’ai fait donner du vin blanc à mes scorpions littéraires, et qu’ils doivent être ivres morts en ce moment.

— Ah ! comtesse ! comtesse !

— Je vais d’abord vous dire l’épigramme.

— De grâce !

France, quel est donc ton destin
D’être soumise à la femelle !…

— Eh ! non, je me trompe, c’est celle que vous avez laissée courir contre moi, celle-là. Il y en a tant que je m’embrouille. Attendez, attendez, m’y voici :

Amis, connaissez-vous l’enseigne ridicule
Qu’un peintre de Saint-Luc fait pour les parfumeurs ?
Il y met en flacon, en forme de pilule,
Boynes, Maupeou, Terray sous leurs propres couleurs ;
Il y joint de Sartines, et puis il l’intitule :
Vinaigre des quatre voleurs.