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Page:Dumas - La salle d'armes 2 Pascal Bruno, Dumont, 1838.djvu/240

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— C’est que j’avais peur que cela ne vous gênât. On ne sait pas quelquefois.

— En aucune manière.

Le brigadier fit le signe de la croix, se mit à table, et commença à attaquer l’épaule de mouton en homme qui a la conscience parfaitement tranquille et qui sait qu’il a fait, dans une circonstance difficile, tout ce qu’un brave soldat peut faire. Bruno lui tint noblement tête, et certes, à voir ces deux hommes, mangeant à la même table, buvant à la même bouteille, tirant au même plat, on n’aurait pas dit que, chacun à son tour, et dans l’espace d’une heure, ils venaient réciproquement de faire tout ce qu’ils avaient pu pour se tuer.

Il y eut un instant de silence, produit moitié par l’occupation importante à laquelle se livraient les convives, moitié par la préoccupation de leur esprit. Paolo Tommasi le rompit le premier pour exprimer la double pensée qui le préoccupait :

— Camarade, dit-il, on mange bien chez