Page:Dumas - Le Caucase, 1859.djvu/221

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
15 centimes le Numéro
18 Mai 1859
No 28

LE CAUCASE
JOURNAL DE VOYAGES ET ROMANS
PARAISSANT TOUS LES JOURS

Nous commençons notre publication par le voyage d’ALEXANDRE DUMAS au Caucase.
Cette première publication de notre Journal, entièrement inédite, sera complète en trente numéros pour lesquels on s’abonne chez Jaccottet, rue Lepelletier, 31, et pour la vente, chez Delavier, rue Notre-Dame-des-Victoires, 11.

Ses pensionnaires ont tous les défauts des femmes sans avoir, bien entendu, aucune de leurs qualités. Ils sont querelleurs, sans que jamais leurs querelles amènent autre chose qu’un vain choc de paroles. Ils sont rapporteurs, et lorsque par hasard un d’entre eux a l’énergie d’en frapper un autre, celui qui est frappé, au lieu de rendre le coup, s’éloigne, et vient en pleurant dénoncer son adversaire. Ils sont avares surtout ; quelques-uns d’entre eux, malgré les maigres profits qu’ils ont l’occasion de réaliser dans ce coin boueux, possèdent jusqu’à quatre ou cinq mille roubles, dont ils peuvent disposer par testament et dont ils disposent presque toujours au profit les uns des autres.

Tout ce qu’ils gagnent leur est laissé par le gouvernement.

Ce sont eux qui font la navigation sur le Rioné lorsque, pendant l’hiver, l’abaissement des eaux ne permet pas au petit bateau à vapeur de faire le service. Le colonel Romanoff nous avait prévenus de ne point leur donner plus de seize roubles, quelque prix qu’ils nous demandassent, ce prix, sans qu’il soit arrêté par un tarif officiel, étant celui qui raisonnablement doit leur être accordé.

Ils commencèrent par nous en demander vingt-cinq, et finirent par accepter les seize roubles offerts.

Seulement, rien ne put les déterminer à partir le même jour. C’était grave, nous étions au 29 ; le colonel nous rassura en nous disant que le bateau ne partait que le 22 au soir.

Deux heures après notre arrivée, le colonel nous faisait servir son propre dîner en nous demandant la permission de le partager avec nous.

Pendant le dîner, mes investigations sur les colons se renouvelèrent. Les Scopsis répondent avec répugnance, comme on le comprend facilement, aux questions qu’on leur fait ; ce-