Page:Dumas - Mes mémoires, tome 1.djvu/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

nous l’avons dit, son cheval l’avait été, et cette nouvelle avait fait grande sensation dans l’armée autrichienne.

Mon père, alors, parla des fameux pistolets qu’il regrettait et qu’il avait chargé Joubert de tirer, s’il était possible, des mains des Autrichiens, où, malgré cette recommandation, ils étaient restés.

Les trois officiers prirent bonne note de ce regret exprimé par mon père, et chacun résolut de se mettre en quête de ces armes précieuses, le commandant, aussitôt qu’il serait au camp, et les deux autres, aussitôt qu’ils seraient libres.

Grâce à mon père, cette liberté ne se fit point attendre : les deux officiers furent échangés contre des officiers français du même grade, et prirent congé de l’état-major avec des protestations de reconnaissance, dont l’un d’eux, au reste, ne tarda point à donner des preuves à mon père.

Huit jours après leur départ, un parlementaire, étant venu au camp français ; et ayant demandé à parler à mon père, lui remit les pistolets tant regrettés par lui, et qui avaient été portés au général Kerpen lui-même, lequel, sur la demande de l’officier pris et blessé par mon père, les renvoyait avec un billet charmant.

Le surlendemain, mon père reçut de cet officier la lettre suivante :

« Monsieur le général,

» J’espère que vous avez reçu, par l’officier parlementaire qui est parti avant-hier d’ici, vos pistolets, que le lieutenant général, baron de Kerpen, vous a envoyés. J’ai reçu mon manteau, ce dont j’ai l’honneur de vous remercier, aussi bien que de toutes les bontés que vous avez eues pour moi. Soyez persuadé, général, que ma reconnaissance est sans égale et que je ne désirerais rien tant que d’avoir l’occasion de vous le prouver. Mes blessures commencent à se guérir, là fièvre m’a quitté. On nous donne les plus grandes espérances de paix. J’espère, d’ici à ce qu’elles se soient réalisées, être en état