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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Les pauvres enfants allaient devenir orphelins ; un miracle sauva madame de Valence.

Un charron, nommé Garnier, qui demeurait rue Neuve-des-Mathurins, était amoureux d’elle. Ce Garnier était municipal. Au péril de sa vie, il brûla deux fois le cahier de notes envoyées au tribunal révolutionnaire par le directeur de la maison d’arrêt, et dans lesquelles madame de Valence était dénoncée comme la plus aristocrate de la prison. Ce dévouement mena madame de Valence jusqu’au 9 thermidor. Le 9 thermidor la sauva.

Tous les ans, au 1er janvier, le charron Garnier venait voir madame de Valence. On se souvenait que c’était à lui qu’on devait cette vie précieuse ; et chacun l’embrassait comme mérite d’être embrassé un sauveur.

À la mort de mon père, M. Collard fut nommé mon tuteur.

J’ai donc pu voir madame Collard encore jeune, c’est-à-dire à l’âge de trente à trente-deux ans, à peu près. Il était impossible de réunir à une si parfaite distinction de manières, à une si haute dignité de gestes et de façons, plus de grâce hospitalière que ne le faisait madame Collard.

Elle avait un fils et trois filles :

Maurice, qui s’est fait gentilhomme campagnard ;
xxxx Caroline, qui avait épousé le baron Capelle, et dont la fille Marie est devenue, sous le nom de madame Lafarge, l’héroïne du drame le plus émouvant qui depuis longtemps se soit déroulé devant une cour d’assises ;
xxxx Hermine, qui a épousé le baron de Martens, ambassadeur de Prusse en Portugal, et qui a hérité de l’esprit, de l’aristocratie et de l’inaltérable jeunesse de sa mère ;
xxxx Enfin, Louise, qui a épousé Garat, l’homme dont la signature est la mieux appréciée de toutes les signatures commerciales.

Louise a été et est encore une des plus jolies femmes de Paris.

J’ai parlé du jardin de ville et du jardin de campagne de M. Deviolaine ; mais qu’étaient-ce que ces jardins, auprès du parc de Villers-Hellon, avec ses grands arbres, ses beaux mas-