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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Les premiers événements de la Révolution se passèrent sans que mon père y prit aucune part. L’assemblée nationale fut constituée, la Bastille tomba, Mirabeau grandit, tonna et mourut, tandis que, simple soldat ou brigadier, mon père faisait ses garnisons en province.

Vers 1790, il vint en détachement à Villers-Cotterets, et y connut ma mère, qu’il épousa comme nous l’avons dit, le 28 novembre 1792.

Cependant, la Révolution grandissait en France et la coalition s’organisait à l’étranger. Le 27 août 1791, quatre jours après la première insurrection des nègres à Saint-Domingue, Léopold Ier, empereur d’Allemagne, et Frédéric-Guillaume II, roi de Prusse, se réunirent à Pilnitz, et, en présence de M. de Bouillé, à qui l’affaire des Suisses de Nancy avait donné une si terrible célébrité, ils rédigèrent la déclaration suivante :

« Leurs Majestés, ayant entendu les désirs et les représentations de Leurs Altesses Monsieur et le comte d’Artois, frères du roi, regardent conjointement la situation où se trouve actuellement le roi de France, comme un objet d’un intérêt commun à toute l’Europe. Ils espèrent que cet intérêt ne peut manquer d’être reconnu par les puissances dont les secours sont réclamés, et qu’en conséquence, elles ne refuseront pas d’employer, conjointement avec Leurs susdites Majestés, les moyens les plus efficaces, relativement à leurs forces, pour mettre le roi de France en état d’affermir, dans les limites de la plus parfaite liberté, les bases d’un gouvernement monarchique également convenables aux droits des souverains et au bien-être de la nation française. Alors, et dans ce cas, Leursdites Majestés, l’empereur et le roi de Prusse, sont résolus d’agir promptement d’un mutuel accord avec les forces nécessaires pour obtenir le but proposé en commun. En attendant, elles donneront à leurs troupes les ordres convenables pour qu’elles soient à portée de se mettre en activité. »

Ce furent ces quelques lignes qui allumèrent à Quiévrain un incendie qui ne s’éteignit qu’à Waterloo.

Le 14 janvier 1792, un décret de l’assemblée nationale invita le roi Louis XVI à demander, au nom de la nation, des expli-