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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Bonaparte a eu peur, il s’est enfui. Le calcul du génie est, aux yeux du général autrichien, l’effet de la peur.

Pendant ce temps-là, Bonaparte, que Wurmser croit fugitif, coupe en deux l’armée de Bayalist à Lonato, en jette sur Salo une portion que poursuit et qu’éparpille Junot, se met à la poursuite de l’autre, qu’il pousse sur Castiglione. Les Autrichiens fugitifs rencontrent, les uns le général Sauret à Salo, les autres le général Augereau à Castiglione ; des deux côtés, ils sont pris entre deux feux.

On fait trois mille prisonniers à Salo, on fait quinze cents prisonniers à Castiglione, on tue et l’on blesse trois à quatre mille hommes, on prend vingt pièces de canon et l’on mêle les fuyards de Bayalist à ceux de Quasdanovitch.

Wurmser a reconnu son erreur, à peine entré dans Mantoue : il accourt au bruit du canon ; il arrive avec quinze mille hommes, en rallie dix mille à Bayalist et à Lilpay, et se met en ligne pour offrir le combat.

Bonaparte l’acceptera, mais il lui faut toutes ses troupes ; il part au galop pour Lonato ; depuis trois jours, il a tout vu, tout ordonné, tout fait par lui-même ; dans ces trois jours, il a crevé cinq chevaux. Il arrive à Lonato ; une partie des troupes qui sont dans la ville se portera sur Salo et sur Gravado, pour achever Quasdanovitch ; tout ce qui restera de disponible redescendra avec lui à Castiglione : à son ordre, les troupes se mettent en marche, chacune pour sa destination ; il reste à Lonato avec mille hommes ; il y prendra quelques instants de repos, et, le soir, il sera à Castiglione pour présenter la bataille à Wurmser au point du jour.

Bonaparte vient de descendre de cheval et de se mettre à table, quand on lui annonce que Lonato est entouré par quatre mille hommes et qu’un parlementaire autrichien est là qui vient le sommer de se rendre.

Avec ses mille hommes, Bonaparte pourrait faire face aux quatre mille et les battre peut-être ; mais il est pressé, c’est une autre ressource qu’il faut employer.

Il ordonne à tout son état-major de monter à cheval, se fait