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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

vers Mantoue, alla juste donner dans une sortie que faisait Wurmser.

Aussi, trois quarts d’heure après son départ, l’enlendit-on crier de loin :

— À cheval, général, à cheval ! l’ennemi me suit.

En effet, il avait manqué être pris, et, se sentant poursuivi de près, il appelait à son aide.

Mon père monta à cheval, se lança à la tête du 20e régiment de dragons, et tomba sur l’ennemi, qu’il refoula dans la place, et qu’il contint jusqu’au jour ; tandis que la division Masséna, toute disloquée par la marche forcée et la distance énorme qu’elle avait parcourue, arrivait à Marmirolo et à Saint-Antoine, où elle se reformait.

L’intention de Bonaparte, en faisant si grande diligence, était d’en finir d’un coup avec Provera, comme, d’un coup, il en avait fini avec Alvintzy.

En effet, du moment où Provera n’était point entré dans Mantoue, du moment où Augereau l’avait suivi par derrière, du moment où, ayant en face de lui Miollis, Bonaparte lui tombait sur les flancs avec la division Masséna, Provera était perdu.

Bonaparte passa la nuit à faire ses dispositions du lendemain.

Mon père resta au poste où il était ; c’était le poste important, puisqu’il était chargé de refouler dans la place Wurmser et ses quinze ou vingt mille hommes, c’est-à-dire une garnison qui, sans compter Provera, était plus forte que l’ennemi qui la bloquait.

Pendant la nuit, Provera, au moyen d’une barque, parvint à communiquer avec Wurmser, et à combiner pour le lendemain avec ce général une attaque sur la Favorite et sur Montada. On ignorait à Mantoue, et dans le camp de Provera, l’arrivée de Bonaparte et des troupes qui avaient combattu la veille à Rivoli.

L’eût-on sue, elle n’était pas croyable et on ne l’eût pas crue.

À cinq heures du matin, mon père fut attaqué par Wurm-