Aller au contenu

Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/11

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
8
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

madame Picot ; c’était de venir avec moi passer la journée à la ferme, et de ne rentrer à la carrière que le soir, pour y coucher.

S’il naissait quelque incident nouveau, on était à l’instant même prévenu par quelqu’un des nombreux journaliers que M. Picot occupait sur le territoire, et qui, dételant un cheval d’une charrue ou d’une herse, accourait à toute bride à la ferme, et donnait l’alarme.

Cinq ou six jours s’écoulèrent ainsi, pendant lesquels on apprit successivement les combats de Lizy, de Saint-Julien, de Bar-sur-Seine.

Enfin, un jour, nous entendîmes le canon, comme je l’ai dit, de la cour de la ferme.

On se battait à Neuilly-Saint-Front.

La nuit qui suivit le combat, je m’endormis la tête pleine de bruit sans doute, et je rêvai que les Cosaques descendaient dans la carrière.

Le matin venu, je communiquai ce rêve à ma mère, à laquelle il fit une telle peur, qu’elle décida que nous partirions le lendemain.

Où irions-nous ? Elle n’en savait absolument rien. Seulement, il lui semblait qu’en changeant de place elle conjurerait le danger.


XXX


Retour à Villers-Cotterets. — Rencontre. — L’étui aux trente louis. — Le sac de peau. — La taupe. — Départ. — Voyage. — Arrivée au Mesnil. — Séjour. — Le roi Joseph. — Le roi de Rome. — Nous quittons le Mesnil. — Séjour à Crépy en Valois. — Les morts et les blessés. — Reddition de Paris. — L’île d’Elbe.

La résolution prise fut exécutée le jour même. Nous montâmes, ma mère et moi, sur le point le plus élevé de la ferme, nous explorâmes les environs, et, ne voyant poindre aucun Cosaque, nous nous hasardâmes à rentrer dans la ville.

À peine avions-nous fait cent pas, que nous rencontrâmes