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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/112

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Eh bien, Joséphine ? avait demandé M. Deviolaine.

— Eh bien, monsieur, c’est fini. Madame est accouchée.

— Heureusement ?

— Heureusement.

— De quoi ?

— D’une fille.

M. Deviolaine fit entendre un grognement des plus significatifs.

— Oh ! mais, ajouta vivement Joséphine, jolie, jolie comme les Amours ! C’est tout le portrait de monsieur.

— En ce cas, grommela M. Deviolaine, en voilà une qui ne trouvera pas facilement à se marier. Tout mon portrait, tant pis ! tant pis, morbleu ! tant pis !… Je n’en fais jamais, d’autre !

Et il s’achemina vers la chambre de sa femme.

Nous étions là, ma mère et moi ; l’accouchée était dans son lit ; une adorable petite fille blanche et rose, qui, sous le nom de madame Davesne, est encore aujourd’hui une des jolies femmes de Paris, attendait dans des langes garnis de dentelles la visite de M. Deviolaine.

Il entra, le cou dans les épaules, les mains dans les poches, regarda autour de lui, étudia la topographie de la salle, et alla droit au berceau, dont il inspecta la mignonne habitante en fronçant son gros sourcil noir.

Puis, se retournant vers sa femme :

— Et c’est pour cet embryon-là que vous avez fait tant de tapage, madame Deviolaine ? demanda-t-il.

— Mais oui, sans doute, dit l’accouchée.

— Peuh ! fit M. Deviolaine en haussant les épaules ; quand je ne suis pas constipé, je fais des crottes plus grosses que ça…

— Bonjour, madame Dumas ! Bonjour, morveux !

Et, tournant sur les talons, il sortit comme il était entré.

— Merci, monsieur Deviolaine, dit l’accouchée. Ah ! je vous réponds bien que ce sera la dernière, celle-là !

Madame Deviolaine a tenu parole.

Eh ! oui, chère et jolie Louise, voilà comme vous avez été traitée le jour de votre naissance ; vous vous en êtes bien ven-