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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/120

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

lents de feu Figaro ; seulement, elle arrêtait et rapportait d’une façon merveilleuse.

Mon beau-frère l’avait laissée à la maison pour deux motifs : le premier, c’est qu’un chien d’arrêt est un accessoire plus gênant qu’utile en battue ; le second, c’est qu’elle était tellement pleine, qu’elle se trouvait hors de service.

Notre étonnement fut donc grand lorsque, en rentrant à la ferme, à la fin de la chasse, Victor vit Sabine, qui venait tranquillement au-devant de nous : elle était parvenue à s’échapper et avait instinctivement, avec cette merveilleuse divination des animaux, suivi son maître.

Au moment de partir, on appela Sabine ; mais Sabine ne parut point. On chercha alors, et l’on trouva la pauvre bête dans un coin de la cour, où elle venait de mettre bas trois petits.

Comme Victor n’avait aucunement envie de faire des élèves, il pria, le fils de M. Moquet de faire un trou dans un tas de fumier qui était devant la porte, et d’y jeter les trois chiens.

Ce qui avait été dit avait été fait, malgré les gémissements de la pauvre Sabine, que l’on fut obligé d’attacher à la banquette de la voiture, pour être sûr qu’elle revînt à Villers-Cotterets avec nous.

Sabine pleura un instant ; mais, au bout de quelques minutes, elle se coucha dans nos jambes, et sembla avoir tout oublié.

Seulement, lorsque nous arrivâmes à notre porte, force fut de détacher Sabine.

Sabine sauta de la voiture à terre, sans user du marchepied, et reprit au grand galop la route de Brassoire.

Mon beau-frère l’appela, la siffla, mais inutilement ; plus il appelait et plus il sifflait, plus Sabine redoublait de rapidité.

Il n’y avait pas à courir après elle à pareille heure : il était minuit. Victor la recommanda à Diane Chasseresse, et nous rentrâmes en ayant soin de laisser la porte de l’allée ouverte, pour que Sabine pût regagner sa niche, si par hasard il lui prenait fantaisie de revenir.