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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/220

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Quelque temps après, la grossesse fut proclamée, et la reine accoucha d’un prince, qui, après la mort de son père, régna sous le nom de Gustave IV.

On sait qu’en 1809, les états de Suède proclamèrent sa déchéance.

J’ai beaucoup connu son fils en Italie, où il voyageait sous le nom de comte de Wasa.

En 1770, Gustave III, alors âgé de vingt-quatre ans, était venu en France sous le nom de comte de Haga. Il avait visité une espèce de devineresse qui, dans des extases magnétiques, prédisait l’avenir ; à peine lui eut-elle touché la main, qu’elle l’invita à prendre garde à l’année 1792, lui annonçant que, dans le cours de cette année, il devait, par un coup d’arme à feu, courir danger de mort.

Gustave était brave ; il avait souvent payé de sa personne. Il raconta plus d’une fois la prédiction en riant, mais ne s’en inquiéta jamais.

À la suite de cette diète de 1792, pendant laquelle la noblesse avait perdu le reste de ses privilèges, une conjuration déjà entamée se renoua.

Les principaux conjurés furent Ankarström, le comte Ribbing, le comte de Horn, le baron d’Erenswaerd et le colonel Lilienhorn.

Ankarström et Ribbing, outre les griefs généraux qui aigrissaient la noblesse contre le roi, avaient des motifs particuliers de haine.

Ankarström avait perdu, par l’intervention du roi, un procès qui avait entraîné avec lui la moitié de sa fortune.

Le comte de Ribbing, comme nous l’avons dit, avait à venger sur le roi une perte bien autrement douloureuse que celle d’un procès, la perte de sa fiancée. Les autres faisaient, du meurtre projeté de Gustave, une affaire de caste, voilà tout.

On résolut d’exécuter ce meurtre au milieu d’un bal masqué, qui devait avoir lieu dans la salle de l’Opéra, pendant la nuit du 15 au 16 mars 1792.

La veille, le roi reçut une lettre anonyme qui lui donnait