Aller au contenu

Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/249

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
246
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

délices que pouvait nous offrir Soissons en qualité de sous-préfecture.

La proposition fut acceptée avec joie. Paillet fut nommé caissier, et nous prîmes bravement la diligence de Paris, qui passait à Villers-Cotterets à trois heures et demie du matin, et qui arrivait à Soissons à six.

Paillet et Ronsin prirent chacun une place dans le coupé, où il y en avait déjà une de prise, et, moi, je montai dans l’intérieur, occupé par quatre personnes, dont trois descendaient à la Vertefeuille, poste distante de trois lieues de Villers-Cotterets, et dont la quatrième continuait sa route pour Soissons.

De la Vertefeuille à Soissons, je devais donc rester seul avec cette personne, qui était un homme de quarante ans, à peu près, assez mince de corps, au visage pâle, aux cheveux châtains, et à la toilette recherchée.

Il avait mis une grande insistance à me faire asseoir près de lui, et s’était, pour me laisser le plus de place possible, rangé du mieux qu’il avait pu dans l’angle de la voiture.

J’avais été très-sensible à cette attention, et j’éprouvais une vive sympathie pour ce monsieur, qui daignait me traiter avec tant de déférence.

Je dormais bien et partout, à cette époque. Aussi, en sortant de la ville, m’étais-je endormi, pour ne me réveiller qu’au relais, et encore ne me serais-je pas éveillé, bien certainement, si les trois voyageurs qui nous abandonnaient ne m’avaient pas, en se retirant, marché sur les pieds, avec l’insistance que mettent d’ordinaire à cette opération les voyageurs qui quittent une voiture, à l’endroit des voyageurs qui y restent.

En me voyant éveillé, le voyageur entama la conversation, s’informa, d’un ton plein d’un bienveillant intérêt, de mon nom, de mon âge et de mes occupations.

Je m’empressai de le mettre au courant de ces particularités, auxquelles il paraissait tenir essentiellement. Je lui racontai le but de notre voyage à Soissons ; et, comme je toussais, tout en me livrant à ce récit, il m’offrit, avec une obligeance que j’avais déjà remarquée en lui, deux pâtes de différentes sortes contre le rhume.