Aller au contenu

Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/283

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

M. Anglès n’est pas au désespoir : il est furieux ! — furieux, parce que l’empereur Alexandre sait tout, et que l’empereur Alexandre est fort irrité.

L’empereur Alexandre a juré qu’il vengerait sa cousine.

Le Journal de Paris ne sait pas que Nicolas veut dire vainqueur des peuples ; mais M. Anglès, qui est ministre de la police, doit savoir qu’Alexandre veut dire qui moud les hommes.

M. Anglès ne veut pas être moulu.

Il conseille donc à Maubreuil de fuir.

— Fuir ! dit Maubreuil. Et la police ?

— Bah ! est-ce que je ne suis pas là ?

Cette assurance ne tranquillise pas Maubreuil le moins du monde.

Il court chez M. de Talleyrand.

M. de Talleyrand le fait jeter à la porte. Est-ce que M. de Talleyrand connaît un voleur de grand chemin ? Fi donc ! Maubreuil se sauve. Il n’a pas fait trois lieues, qu’il est empoigné, comme on disait sous la Restauration, jeté dans un cachot, d’où il sort au retour de l’empereur, et où il rentre au retour de Louis XVIII.

Après deux nouvelles mises en liberté, et deux arrestations nouvelles, Maubreuil, qui n’a jamais cru qu’on oserait le juger, Maubreuil comparaît enfin devant la cour royale de Douai, chambre de police correctionnelle.

L’affaire faisait grand scandale, comme on s’en doute bien. M. de Talleyrand niait, M. Anglès niait, Roux-Laborie niait ; tout le monde niait, — excepté Maubreuil.

Maubreuil non-seulement avouait tout, lui, mais, d’accusé, il s’était fait accusateur.

Il va sans dire que défense expresse était faite aux journaux de rendre compte des séances.

Mais maître Mennesson avait un ami qui assistait à ces séances. Cet ami, sténographe sans doute, notait, écrivait, constatait, et lui envoyait ses comptes rendus.

C’était cela que je copiais à deux, trois, quatre exemplaires, que je distribuais, au nom de notre notaire républicain, plein de foi, plein d’ardeur, plein de confiance.