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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/58

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

militaire, avait apporté, dans la nuit du 4 au 5, cette nouvelle à son collègue du département du Rhône.

Le télégraphe était dans les attributions de M. de Vitrolles, ministre d’État, secrétaire des conseils du roi. Ce fut lui qui reçut la dépêche, place Vendôme, où étaient ses bureaux. Il ne prit pas même le temps de faire mettre les chevaux à sa voiture, et courut à pied aux Tuileries, pour communiquer la dépêche au roi.

Elle était conçue en ces termes :

« Bonaparte a débarqué, le 1er mars, près de Cannes, dans le département du Var, avec douze cents hommes et quatre pièces de canon. Il s’est dirigé sur Digne et Gap, pour prendre, à ce qu’il paraît, la route de Grenoble ; toutes les mesures sont prises pour l’arrêter et déjouer cette tentative insensée. Tout annonce le meilleur esprit dans les départements méridionaux. La tranquillité publique est assurée. »

Louis XVIII prit la dépêche des mains de M. de Vitrolles, et la lut avec la plus grande tranquillité.

Puis, après l’avoir lue :

— Eh bien ? demanda-t-il.

— Eh bien, sire, dit M. de Vitrolles, j’attends les ordres de Votre Majesté

Louis XVIII fit des épaules un mouvement qui signifiait : « Est-ce que cela me regarde, moi ? »

Puis, tout haut :

— Allez voir le maréchal Soult, fit-il, et dites-lui de faire ce qui est nécessaire.

M. de Vitrolles courut chez le maréchal Soult, mais il n’eut pas besoin d’aller jusqu’au ministère de la guerre.

Il rencontra le maréchal Soult sur le pont Royal.

Tous deux revinrent aux Tuileries.

Le maréchal niait là véracité de la nouvelle. Il la niait si bien, qu’il répondit au commandant militaire qu’il recevrait des ordres le lendemain.