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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/222

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Et combien cela fait-il de volumes ?

— Deux ou trois cents, peut-être.

— Et vous les avez lus ?

— Certainement.

— Et il faut que je les lise ?

— Si vous voulez faire du roman, il faut non-seulement que vous les lisiez, mais encore que vous les sachiez par cœur.

— Je vous déclare que vous m’épouvantez ! Mais j’en ai pour deux ou trois ans avant d’oser écrire un mot !

— Oh ! pour plus que cela, ou vous écrirez sans savoir.

— Mon Dieu ! mon Dieu ! que j’ai perdu de temps !…

— Il faut le rattraper.

— Vous m’aiderez, n’est-ce pas ?

— Et le bureau ?

— Oh ! je lirai la nuit, j’étudierai la nuit ; au bureau, je travaillerai, et, de temps en temps, nous causerons un peu…

— Oui, comme aujourd’hui ; seulement, nous avons causé beaucoup.

— Encore un mot. Vous m’avez dit ce qu’il fallait étudier comme théâtre ?

— Oui.

— Comme roman ?

— Oui.

— Comme histoire ?

— Oui.

— Eh bien, maintenant, en poésie, que dois-je étudier ?

— D’abord, qu’avez-vous lu ?

— Voltaire, Parny, Bertin, Demoustier, Legouvé, Colardeau.

— Bon ! Oubliez tout cela.

— Vraiment ?

— Lisez, dans l’antiquité, Homère ; chez les Romains, Virgile ; au moyen âge, Dante. C’est de la moelle de lion que je vous donne là.

— Et chez les modernes ?

— Ronsard, Mathurin Regnier, Milton, Gœthe, Uhland, By-