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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/224

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Oh ! si cela dépend de moi, nous en avons pour quelques années.

— Ainsi soit-il.

Et sur ce, M. Oudard étant entré, je me mis à ma besogne avec un acharnement qui, à la fin de la journée, me valut tous ses compliments.

Je venais de m’apercevoir d’une admirable chose : c’est que je pouvais copier, sans lire ce que je copiais, et, par conséquent, tout en copiant, penser à autre chose.

Dès le second jour, j’en étais arrivé où les autres n’arrivent qu’au bout de quatre ou cinq ans.

Comme on le voit, j’avais marché vite.

LXXX

Adolphe lit une pièce au Gymnase. — M. Dormeuil. — Le Château de Kenilworth. — M. Warez et Soulié. — Mademoiselle Lévesque. — La famille Arnault. — La Feuille. — Marius à Minturnes. — Un mot de Danton. — Le passe-port retourné. — Trois fables. — Germanicus. — Inscriptions et épigrammes. — Ramponneau. — Le jeune homme au tilbury. — Hors de l’Église, pas de salut. — Madame Arnault.

Bien m’en prenait de pouvoir copier sans lire ; car, on le comprend, la conversation de Lassagne me donnait fort à penser. Tous les jours, je m’apercevais davantage de ma terrible ignorance, et, comme un voyageur perdu dans ces marais de houille tremblante, je ne savais plus où poser le pied pour trouver le passage solide qui devait me conduire au but que je poursuivais.

Comment Adolphe ne m’avait-il pas parlé de tout cela ? C’étaient de si lointains horizons que ceux qui m’étaient ouverts à chaque moment, que ma vue s’y perdait.

Adolphe ne croyait donc pas que tout cela fût bien utile pour faire de la littérature ? ou bien, la littérature qu’il voulait me faire faire, pouvait-elle se passer de tout cela ?

J’avais vu si souvent son père hausser les épaules à nos pro-