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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/225

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

jets de théâtre ; n’était-ce pas que son père, qui savait tant de choses, se moquait tout bas de mes projets, à moi, qui ne savais rien ?

Et M.. Deviolaine, qui, instinctivement, lui, — car, excepté en expertise et en aménagements forestiers, il n’en savait guère plus que moi, — et M. Deviolaine qui, instinctivement, appelait mes essais de pièce des ordures, et mes tentatives de poésie des guenilles, est-ce qu’il avait raison par hasard ?

Enfin, on lirait, on travaillerait, on étudierait ! mais comment toutes ces choses dont j’entendais parler depuis la veille tiendraient-elles jamais dans ma tête sans la faire éclater ?

Je comptais bien avoir, sur tout cela, une explication avec Adolphe.

À cinq heures et demie, j’étais chez M. de Leuven ; mais Adolphe n’était pas encore rentré : il lisait, au Gymnase, une pièce faite en collaboration avec Frédéric Soulié.

À six heures moins un quart, je le vis apparaître, plus morne et plus pensif qu’Hippolyte suivant le chemin de Mycènes.

— Eh bien, mon pauvre ami, lui dis-je, encore refusé ?

— Non, me répondit-il ; mais reçu à correction, seulement.

— Alors, tout espoir n’est pas perdu ?

— Si fait. Après la lecture, Dormeuil nous a fait venir dans son bureau, et, comme il trouvait des longueurs dans la pièce, à ce qu’il paraît, il nous a dit : « Mes petits enfants, mes petits enfants, il faut trancher dans le vif. » À ces mots, Soulié lui a arraché la pièce des mains, en disant : « Monsieur Dormeuil, on ne touche pas à ces choses-là. » Alors, vous comprenez, Dormeuil est furieux.

— Qu’est-ce que c’est que Dormeuil ?

— C’est un des directeurs du Gymnase.

— De sorte que… ?

— De sorte que Soulié a déclaré que la pièce serait jouée comme cela, ou qu’elle ne le serait pas du tout.

— Ah ! diable ! ça lui est donc égal, à Soulié, d’être joué ou de n’être pas joué ?

— Vous ne connaissez pas la tête de ce garçon-là ; pas