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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 5.djvu/134

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

tion. D’ailleurs, on peut être fier de descendre de Louis XIV, tout en blâmant les turpitudes de Louis XV et les fautes de Louis XVI ; or, qui avait fait surtout nos pères républicains ? Le Parc-aux-Cerfs et le Petit-Trianon.

Le duc d’Orléans était donc, sinon un prince républicain comme on l’avait appelé en 1792, du moins un prince citoyen comme on l’appelait en 1829.

Somme toute, c’était chose honorable pour ma position, et une chose sympathique à mon cœur, que de rester attaché à M. le duc d’Orléans.

Toutes ces réflexions s’étaient déjà présentées à mon esprit depuis assez de temps pour qu’elles eussent eu celui d’y mûrir, quand je reçus une lettre d’Oudard, qui me priait de passer à son bureau.

Autrefois, une pareille invitation m’eût fort inquiété ; aujourd’hui, elle me faisait sourire.

Je me présentai ; Raulot me salua jusqu’à terre ; il ouvrit la porte et annonça :

M. Alexandre Dumas.

Oudard vint à moi en riant.

— Eh bien, me dit-il, mon cher poëte, il paraît que décidément vous avez un succès ?

— Mais oui.

— D’abord, recevez-en tous mes compliments… Mais qui pouvait prévoir cela ?

— Ceux qui m’avaient supprimé mes gratifications et retenu mes appointements ; car je présume que, s’ils eussent prévu une chute, ils n’auraient pas eu la cruauté de m’exposer à mourir de faim, moi et ma mère.

— Est-ce que M. de Broval ne vous a pas écrit, le soir de la représentation ? me dit Oudard un peu embarrassé.

— Si fait ; voici sa lettre.

Je lui montrai la lettre qu’on a lue.

— Et je la garde comme un modèle, continuai-je en la remettant dans ma poche.

— Comme un modèle de quoi ?

— De fausseté diplomatique et de plate courtisanerie.