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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 5.djvu/265

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

griffes, grâce à M. de Martignac, qui était venu à mon secours.

Hugo s’adressa donc à M. de Martignac.

Mais, si bienveillant, si spirituel, si littéraire même que fût ce modèle des ministres présents, passés et futurs, il s’avoua impuissant.

Il s’agissait, non plus d’un Valois, mais d’un Bourbon ; non plus d’un prédécesseur, mais d’un aïeul de Charles X.

Charles X pouvait seul prononcer dans cette question de famille.

Hugo résolut de demander une audience à Charles X.

L’audience lui fut accordée.

À cette époque, on n’abordait les rois de France qu’en habit à la française et l’épée au côté. Hugo se décida à grand’peine à ce travestissement ; mais Taylor se chargea de réunir les différentes pièces de l’habillement. Il tenait énormément à Marion Delorme, et, pour que Marion Delorme lui fût rendue, il eût habillé Hugo en Turc ou en Chinois.

Le jour de l’audience arriva. Hugo se rendit à Saint-Cloud. L’antichambre était comble.

Au nombre des personnes qui attendaient, étaient madame du Cayla, qui venait mettre la dernière main au ministère Polignac, et Michaud, de l’Académie, qui partait pour la Palestine. Michaud était lecteur du roi. Il était brodé d’or, à lui tout seul, comme quatre généraux ! C’était, cependant, un homme de beaucoup d’esprit que Michaud.

Hugo était occupé à causer avec lui, quand les deux portes s’ouvrirent, et qu’on annonça Son Altesse royale monseigneur le dauphin.

Hugo n’avait jamais vu de près celui pour lequel il avait voulu qu’on haussât l’Arc de triomphe, afin

Que le géant de notre gloire
Pût y passer sans se baisser !

Il vit apparaître quelque chose comme un singe, moins la grâce ; une espèce de momie au visage tourmenté par un tic