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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 5.djvu/73

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

mandé à Françoise de monter ou de faire monter à l’instant même les lettres qui arriveraient pour moi.

— Eh bien, mais, repris-je, peut-être que celle-ci, que je vous apporte…

— Ce n’est pas là sa manière de les plier ; mais n’importe ; comme elle arrive d’Angers…

Puis, la tournant pour en rompre l’enveloppe :

— Ah ! mon Dieu ! dit-il, elle est cachetée de noir… Pauvre amie ! il lui sera arrivé quelque malheur !

Et M. Villenave décacheta lettre en palissant ; elle en renfermait une seconde.

Aux premières lignes qu’il lut de cette première lettre, ses yeux se remplirent de larmes.

— Tenez, dit-il en me la présentant, lisez !

Et, tandis que, tristement et silencieusement, il ouvrait la seconde lettre, je pris la première, et je lus :

« Monsieur,

» C’est avec ma douleur personnelle, augmentée de celle que vous allez éprouver, que je vous annonce que madame*** est morte, dimanche dernier, comme sonnait le dernier coup de minuit.
xxx » Elle avait, la veille au moment où elle vous écrivait, été prise d’une indisposition que nous crûmes légère d’abord, et qui alla s’aggravant jusqu’au moment de sa mort.
xxx » J’ai l’honneur de vous envoyer, toute incomplète qu’elle est, la lettre qu’elle avait commencée pour vous. Cette lettre vous prouvera que, jusqu’au moment de sa mort, les sentiments qu’elle vous avait voués sont restés les mêmes. Je suis, monsieur, bien tristement, comme vous pensez, votre très-humble et très-obéissante servante.

« Thérèse Miraud. »

— Eh bien, vous voyez, me dit M. Villenave, c’est au dernier coup de minuit que le portrait est tombé, c’est au dernier coup de minuit qu’elle est morte.