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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 6.djvu/79

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

autorisation ; mais l’illustre jurisconsulte, au lieu de-résoudre le problème qu’on lui proposait, s’était contenté de répondre :

— Messieurs, la Chambre est dissoute… Messieurs, je ne suis plus député…

Et, quelques instances qu’ils eussent faites, journalistes et députés n’avaient pu tirer autre chose de lui.

Les journalistes s’en étaient allés furieux ; les rédacteurs du Courrier français, du Journal du Commerce, du Journal de Paris avaient déclaré qu’ils allaient introduire un référé qui aurait pour but d’obtenir du président du tribunal de première instance, M. de Belleyme, une ordonnance prescrivant aux imprimeurs de prêter leurs presses aux journaux non autorisés.

Mais le moyen d’espérer que M. de Belleyme rendrait un arrêt, quand M. Dupin avait refusé de donner une simple consultation !

Néanmoins toutes ces démarches indiquaient déjà un commencement de résistance. Étienne, de son côté, prétendait que son frère ne prononcerait pas son discours, et prendrait pour prétexte de son silence la gravité de la situation.

Le courage et le patriotisme de François Arago étaient assez connus pour que l’on ne trouvât rien d’étonnant à cette opinion émise par son frère.

Nous arrivâmes à l’institut. Il y avait grande agitation parmi tous ces immortels, d’habitude si calmes dans leurs habits bleus brodés de vert.

On n’était pas encore en séance. Le bruit courait qu’Arago, ne parlerait pas. Quelques académiciens disaient qu’il parlerait, attendu qu’il était trop honnête homme pour compromettre l’Académie par son silence.

— Parlera-t-il ? ne parlera-t-il pas ? demandai-je à Étienne.

— Nous allons le savoir, me répondit-il ; le voici là-bas.

— Eh ! dis-je, n’est-ce point avec le duc de Raguse qu’il cause ?

— Oui ; le duc de Raguse est un de ses plus vieux amis.

— Avançons donc… Je suis bien aise de savoir ce que le