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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/167

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Ma maîtresse.

— Ah ! me dit Georges en entrant, vous venez de vous en passer pendant six semaines ; vous vous en passerez bien pendant quinze jours, de votre maîtresse.

Je me mis à rire.

— La préviendra-t-on, au moins ?

— Elle est prévenue.

— Par qui ?

— Par moi, dit Harel, et elle a déjà reçu sa prime.

— Laquelle ?

— Un bracelet.

Je pris les deux belles mains de Georges, et, m’adressant à Harel :

— Ma foi ! mon cher ami, lui dis-je, vous faites les choses de façon qu’il n’y a pas moyen de vous refuser… Demain, je me mets à votre Napoléon, et, dans huit jours, vous l’aurez.

— Vous êtes bien pressé de nous quitter, mon cher ! dit Georges en relevant sa lèvre d’impératrice.

— Bon ! dis-je, la pièce sera finie quand elle sera finie… Ce n’est pas moi qui suis pressé, c’est Harel…

— Harel attendra, dit Georges avec ses airs de Cléopâtre et de Médée.

Je m’inclinai ; je n’avais plus rien à dire. Harel me montra un cabinet de toilette et ses dépendances, me fit observer que ma chambre n’avait d’autre issue que celle de Georges, sortit avec elle, et m’enferma.

On avait poussé l’attention jusqu’à envoyer chercher chez moi mon pantalon à pieds.

Le même soir, ou plutôt le même matin, je me mis au travail et je trouvai le rôle de l’espion et la division du drame. Le rôle de l’espion trouvé, tout l’était. Quant à la division du drame, elle était donnée par l’histoire elle-même.

— De Toulon à Sainte-Hélène ! m’avait dit Harel. Je dépenserai cent mille francs, s’il le faut !

Il était difficile de me laisser plus de marge.

Dès le lendemain matin, je me mis à écrire.