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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/91

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Arrangez cela comme vous l’entendrez, lui dis-je.

— Ah ! à la bonne heure !… Où allez-vous de ce pas ?

— À la Jarrie, entre Clisson et Torfou.

— Vous n’êtes pas sur le chemin.

— Je le sais bien, et j’avais pris exprès le plus long.

— Vous allez chez des amis ?

— Oui.

— Eh bien, croyez-moi, laissez-moi vous conduire chez ces amis-là… Nous pouvons facilement y être après-demain. Restez huit jours chez eux ; pendant ce temps-là, je ferai si bien de mes pieds et de mes mains, que vous pourrez vous remettre en route… Est-ce dit ?

— Ma foi, oui, je m’abandonne entièrement à vous… Vous connaissez le pays ; vous en êtes !… Maintenant, s’il m’arrive malheur, cela vous regarde.

— Oui, monsieur, et, à partir de ce moment, je réponds de vous à votre bon ange.

Deux jours après, j’arrivais à la Jarrie, non-seulement sans accident, mais encore chargé de toute sorte de souhaits de bonheur recueillis sur ma route, déblayée de tout danger, grâce au récit vingt fois répété de mon homme, qui allait devant moi comme un coureur, racontant à qui voulait, et même à qui ne voulait pas l’entendre, le service que je lui avais rendu.

Aujourd’hui, j’avoue que j’ai un grand regret, presque un remords : moi qui me souviens si bien du nom de M. Detours, j’ai complètement oublié le nom de mon Vendéen.