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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 8.djvu/242

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

jenny. — Ah !… (Elle se relève tout ensanglantée.) Ah ! Richard !… (Elle chancelle en étendant les bras de son côté, et retombe.) Il faut que je vous aime bien ! (Elle s’évanouit.)

richard. — Évanouie !… blessée !… du sang !… Malédiction !… Jenny !… Jenny ! (Il la porte sur un fauteuil.) Et ce sang qui ne s’arrête pas… (Il l’étanche avec son mouchoir.) Je ne peux cependant pas rester éternellement ici. (Il se rapproche d’elle.) Jenny, finissons… Je me retire… Tu ne veux pas répondre ?… Adieu donc !…

Restait le dernier acte.

Le dernier acte se compose de trois tableaux : le premier se passe dans l’hôtel de Richard, à Londres, le second, dans une forêt ; le troisième, dans la chambre de Jenny.

On sait l’engagement que j’avais pris de faire jeter Jenny par la fenêtre. Eh bien, je m’apprêtais bravement à le tenir, et j’écrivais, comme d’habitude, la scène dans mon lit.

Voici la situation :

Mawbray a tué Tompson, qui enlevait Jenny et a ramené celle-ci dans la chambre où a eu lieu, entre elle et son mari, la scène du second acte. Cette chambre n’a que deux portes : une qui donne sur l’escalier, l’autre dans un cabinet, et une fenêtre d’où la vue plonge dans un précipice.

À peine Jenny est-elle restée seule avec ses terreurs, — car elle ne peut pas douter que ce ne soit son mari qui l’ait fait enlever, — qu’elle entend et reconnaît le pas de Richard. Ne pouvant fuir, elle se réfugie dans le cabinet. Richard entre.

richard. — J’arrive à temps ! À peine si je dois avoir, sur le marquis et sa famille, une demi-heure d’avance. — James, apportez des flambeaux, et tenez-vous à la porte pour conduire ici les personnes qui arriveront dans un instant… Bien… Allez ! (Tirant sa montre.) Huit heures ! Tompson doit être maintenant à Douvres, et, demain matin, il sera à Calais. Dieu le conduise !… Voyons si rien n’indique que cet appartement a été habité par une femme. (Apercevant le chapeau et le châle que Jenny vient de déposer sur une chaise.) La précaution n’était pas inutile… Que faire de cela ? Je n’ai pas la clef des armoires… Les jeter par la fenêtre : on les retrouvera demain… Ah ! des lumières sur le haut de la montagne… C’est sans doute le marquis ; il est exact…