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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 8.djvu/299

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

» Une aux Élections, avec un ennemi de M. de Laville, qui prétendait que j’avais applaudi.

» Une enfin, à Pertinax, avec un ami de M. Arnault, pour n’avoir ni applaudi ni sifflé.

» J’attends ce conseil de votre bonté, monsieur, et je vous donne ma parole que je le suivrai, si toutefois il n’est pas impossible à suivre.

» J’ai l’honneur, etc. »

Après cette dernière ligne, le Journal de Paris reprenait en manière de réponse :

« Quant au conseil que M. Alexandre Dumas veut bien demander à notre expérience, sur la conduite à tenir pour ne pas avoir de disputes aux premières représentations, nous lui répondrons qu’un jeune auteur, heureux d’un beau succès, et qui sait couvrir d’une honorable modestie ses jouissances d’amour-propre ; — qu’un écolier de l’art qui se résigne, comme M. Dumas, à étudier ce que font les maîtres, jusqu’à l’auteur de Pertinax inclusivement, — ne doit pas avoir à redouter d’injurieuses provocations. Si, malgré ces dispositions, naturelles sans doute au caractère de M. Dumas, on persistait à lui faire des querelles d’Allemand ou de classique, je lui conseillerais de les mépriser, non les Allemands, non les classiques, mais les querelles.

» Ou bien encore, il lui resterait une autre ressource : ce serait celle de s’abstenir d’aller aux premières représentations. »

Le conseil, on en conviendra, était difficile, sinon impossible à suivre : j’étais trop jeune, j’avais le cœur trop près de la tête, et, comme on dit vulgairement, la tête trop près du bonnet, pour mépriser les querelles, fût-ce des querelles d’Allemand ou de classique, et j’étais trop curieux pour ne point assister régulièrement aux premières représentations.

J’ai été guéri, depuis, de cette dernière maladie ; mais il a fallu du temps. Et encore, ce n’est pas le temps qui m’a guéri ; ce sont les premières représentations.