Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/33

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voisines. Et Lucienne Dué. lorsqu’elle rentrait, se voyait reçue de telle façon que la seule venue du soir lui était déjà un vrai supplice.

On l’avait mise chez une repasseuse, mais ce métier l’écœura, et d’ailleurs sa santé s’y fût perdue tôt — ce que s’était avisé de dire aux Dué un médecin venu soigner le père, après une saoulée trop complète.

On plaçait alors Lucienne chez une modiste. Cela plaisait à ses goûts naturels d’élégance. Elle montra de véritables dispositions pour tendre les satins et les velours sur les carcasses de laiton, de linon raidi ou de sparterie. Elle avait d’instinct le sens des couleurs associées et harmonisées. Ses doigts fins tournaient avec art les nœuds de soie ou de ruban. Toutefois son gain restait minuscule et c’était l’objet d’un des plus vifs reproches que lui fissent ses parents, Ils semblaient toujours admettre qu’aimant mieux son métier on l’eût spontanément couverte d’or.

Et voilà que l’oncle forgeron s’était montré entreprenant.

Il venait souvent offrir un verre de quelque alcool, fabriqué en fraude, au menuisier qui tout le jour fainéantait dans ses copeaux. Tous deux s’asseyaient sur un établi en causant. On parlait de la pluie et du beau temps, des affaires qui n’allaient pas et des santés