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Page:Eekhoud - Les Pittoresques, 1879.djvu/191

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La Guigne


Oh ! s’il pouvait encor l’emporter sur sa couche !
Mais il était trop fort : le satyre effarouche
La sylphide ; la nymphe a peur des faunes roux ;
Mais le satyre brûle, et le faune est jaloux,
Surtout si quelque nuit, ô femme, sur ta bouche
Il assouvit la soif que tu mettais en nous !

Et le Veloureux pleure. On ignore qu’il souffre.
Près de lui cette Guigne au parler insolent,
Qui trouve qu’à ramer son bras devient trop lent,
Cette Guigne l’aimait ! Et des flammes de soufre
Passent devant ses yeux, et le reflet sanglant
De la lune lui dit que profond est le gouffre.

« Retournons, dit Gaston ; il fait frais, il est tard…
— Il est même trop tard ! lui répond le brave homme.
— Tiens, qu’a-t-il, celui-là, pour sortir de son somme ? »
Reprend le blond gandin. C’est égal, l’œil hagard
N’a rien de cet éclat que rassurant l’on nomme.
Et Gaston vaguement souhaite être autre part.

« Oui, que voulez-vous dire ? » intervient sa maîtresse ;
Et le ton de sa voix égratigne et caresse.
« Vous avez dit un mot que je n’ai pas compris. »