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Page:Eekhoud - Les Pittoresques, 1879.djvu/69

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Le Garde forestier

 
Il est de ces derniers. Cependant, sans trembler,
Comme la nuit de veille est lente à s’écouler,
De préférence il bat les gorges les moins sûres,
Où pour l’affût nocturne ont poussé les ramures,
Entre dans les fourrés, les buissons mal famés,
Qu’évitent des chasseurs en nombre et bien armés.
Il n’a, lui, qu’un fusil de système incommode ;
Mais son courage aussi vaut une arme à la mode.

Ainsi le surprend l’aube. Ainsi, depuis vingt ans,
Passent les nuits d’automne et les nuits de printemps.
Il songe à peine au ciel quand celui-ci s’azure,
Au nid qui se réveille, au frelon qui susurre,
Au nid qui sAux parfums, aux rayons,
Au nid qui sAux fleurs, aux papillons.
Il retourne, absorbé. C’est qu’au fond de son être
Repose un doux penser, facile à reconnaître
À ce regard humide, ineffable et joyeux,
Effluve de bonheur illuminant les yeux.

Car, là-bas, où l’on voit au-dessus du feuillage
Monter en flocons bleus comme un léger nuage,
Est le toit, le foyer, l’asile qu’il chérit,
Enguirlandé de pampre auquel l’été sourit.