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Page:Eekhoud - Les Pittoresques, 1879.djvu/72

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La Vengeance de Phanor

Quand son journal contient quelque banal récit
D’un crime ou d’un malheur complaisamment décrit,
Avec de gros soupirs elle plaint ce bas monde,
Et, sensible, de pleurs sa prunelle s’inonde.

Mais le chien… Ce serait pour tous un débarras,
Pour lui-même d’abord, si quelqu’un dans les bras
Le portait jusqu’à l’eau de la rivière proche…
On aurait une corde, un caillou dans la poche.

Elle s’arrête court. Elle n’ose achever,
Son époux ayant fait mine de se lever.
« Cela ne presse pas… On peut encore attendre, »
Veut-elle insinuer de sa voix calme et tendre.

Mais leur blondin mignon s’en mêle. « Dis, maman,
C’est demain jour de fête, et le premier de l’an.
Je voudrais bien avoir un chien qui saute et joue… »
Puis, d’un air enjôleur, recourant à sa moue :
« Petit papa, Phanor est toujours ennuyeux.
Est-ce longtemps, dis-moi, que les chiens restent vieux ? »
De leur bébé chéri la naïve boutade
Décide les parents, et dans leur embrassade
Le petit sent déjà qu’il aura ce qu’il veut.