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Page:Eliot - Daniel Deronda vol 2&3.djvu/149

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grande influence de sa femme !.. Elle y avait cru autrefois ; mais aujourd’hui !..

— Je le ferais avec bien du plaisir, mon oncle, répondit-elle avec assez de sang-froid, mais je ne pense pas que M. Grandcourt consente à se soumettre aux fatigues d’une élection, à moins de ne point prononcer de discours. Les candidats ne font-ils pas toujours des discours ?

— Ce n’est pas absolument nécessaire, dit M. Gascoigne. Un homme bien posé peut arriver sans cela, et quelquefois il sera préféré à un bavard. Dites cela à M. Grandcourt.

— Ah ! voici Jocosa avec mon chocolat ! s’écria Gwendolen, heureuse d’éviter ainsi la réponse.

M. Gascoigne savait bien que Grandcourt était un orgueilleux et un égoïste, mais il ne pensait pas devoir s’abstenir de donner de bons conseils et de vouloir du bien au mari de sa nièce, par le seul motif qu’il le tenait insolemment à distance. Madame Gascoigne, moins indulgente que le recteur, trouvait que l’impertinence de Grandcourt avait quelque chose de blâmable, même chez Gwendolen.

— Votre oncle et Anna, dit-elle avec un léger accent de mécontentement, iront très probablement à Londres vers Pâques. Notre cher Rex espère revenir avec les honneurs et l’agrégation ; aussi désire-t-il que son père et Anna viennent le trouver à Londres pour un peu s’amuser ensemble, comme il le dit. Je ne serais pas surprise que lord Brackenshaw les invitât, car il a été très poli avec nous depuis son retour au château.

— J’espère que mon oncle m’amènera Anna à Grosvenor square, dit Gwendolen, qui, au fond du cœur, souhaitait de n’être jamais obligée de mettre un membre de sa famille en contact avec Grandcourt. Je suis enchantée des succès de Rex.

— Il ne faut pas nous réjouir d’avance, riposta le recteur pour qui ce sujet était le plus intéressant de tous, quoique