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Page:Eliot - Daniel Deronda vol 2&3.djvu/148

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— C’est partir pour Londres de bien bonne heure, fit observer madame Gascoigne, car M. Grandcourt n’est pas au parlement.

— La chasse ne durera plus qu’un jour ou deux, répondit Gwendolen, et Henleigh a quelques affaires à terminer en ville. Je suis contente d’aller à Londres.

— Tu verras ta belle maison de Grosvenor square, dit madame Davilow.

Comme elle, ses filles dévoraient des yeux chaque mouvement de leur déesse qui allait bientôt disparaître.

— Oui, répondit-elle, comme si elle éprouvait un grand intérêt pour ce qui l’y attendait ; il y a tant à voir et tant à faire à Londres !

— Ma chère Gwendolen, dit M. Gascoigne d’un ton cordial et désireux de l’aire entendre son avis, je voudrais que vous usiez de votre influence sur M. Grandcourt pour l’engager à entrer au parlement. Un homme de son rang ferait sentir son poids en politique. Les meilleurs esprits pensent que le ministère devra en appeler au pays sur la question de la réforme et M. Grandcourt pourrait profiter de cette occasion. Je ne suis pas bien sûr que ses opinions concordent parfaitement avec les miennes, je ne l’ai pas entendu encore s’exprimer ouvertement, mais je n’envisage pas la chose à ce point de vue. Je suppose que votre mari demeurera dans le pays, et il est arrivé à l’âge où un homme comme lui doit entrer dans les affaires publiques. Une femme a beaucoup d’influence sur son mari ; usez de la vôtre en ce sens, ma chère.

Le recteur, en pérorant ainsi, croyait s’acquitter d’un devoir, et donner au mariage de sa nièce l’aspect d’un bienfait public. Quant à Gwendolen, cette allocution lui fit l’effet d’une lamentable comédie. Si elle avait été gaie, elle aurait ri en écoutant son oncle qui n’avait pas entendu Grandcourt s’exprimer ouvertement sur la politique. Et la